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Le modèle holacratique : modèle de réussite avant-gardiste ou fantasme utopique de l’entreprise 4.0 ?

Initiée en 2001, par l’éditeur de logiciels américain Ternary Software, le concept d’Holacratie, qui pourrait être traduit par « totalité des pouvoirs » a su imposer sa marque au fil du temps au sein de milliers de start-ups à travers le globe. De plus, ce modèle a séduit également quelques-unes des plus grandes sociétés telles que Castorama, Danone, FAVI par son modèle d’exemplarité décomplexée et de transparence collective. Les résultats de ce système d’organisation parlent d’eux-mêmes : les entreprises ayant adopté la « libération » surperforment, quel que soit le secteur ou le lieu de leurs activités. Mais alors pourquoi l’ensemble des sociétés, entreprises ou start-ups ne sont-elles pas séduites par ce système holacratique ?

1/L’Holacratie, vers une agilité assumée de l’entreprise libérée

Afin de comprendre comment fonctionne ce système d’organisation, ou plutôt, de décentralisation de la gouvernance en entreprise, il faut tout d’abord s’intéresser de près à l’origine de ce concept de recentrage de l’humain au sein des structures de travail. Le terme anglais « holacracy », inventé en 1967 par l’auteur hongrois Arthur Koestler, dans son ouvrage philosophique, intitulé    The Ghost In The Machine  expérimente la thèse de Descartes sur la dualité existante entre le corps et l’esprit. L’holacratie provient étymologiquement du grec « Holos », signifiant la totalité ; et « Kratos » le pouvoir. L’idée est donc la suivante: la transmission du pouvoir de gouvernance à l’ensemble des acteurs de l’entreprise.

L’autonomisation des actions par consentement dynamique mutuel, la dissémination des mécanismes de prises de décisions via des cercles de responsabilités interconnectés, ainsi que l’aplanissement de la hiérarchie, font partie intégrante des fondements de l’entreprise libérée. Une entreprise décomplexée, libérée de tous process lourds, de tous contrôles et de tous systèmes de surveillance, basée essentiellement sur la confiance mutuelle et la communication des idées à un ensemble. Les salariés possèdent non plus des objectifs individuels, mais une mission collective. Les voyages d’affaires perdent leur sens initiaux et deviennent de vraies expériences de vie à partager. Une société en avance sur son temps, libérée des chaînes du travail, et où la transparence est devenue le maître mot de ce système intelligent de l’entreprise 3.0.

2/ Les clés du succès de l’entreprise « libérée »

Sur le papier, l’aplanissement des hiérarchies paraît être la solution la mieux adaptée à cette politique de flexibilisation de l’entreprise, les employés, libérés de la pression des managers, deviennent plus productifs car moins stressés. Mais l’expérience a prouvé que l’absence d’autorité au sein des structures de travail pouvait déclencher un phénomène d’anarchie, véritable fléau des entreprises et cauchemars des supérieurs. Dans un système holacratique, les salariés sont amenés à choisir eux-mêmes leurs leaders. Selon l’expérience, ces-derniers peuvent leur apporter dans le processus d’accomplissement de leur mission, apportant ainsi un vrai leadership au sein des acteurs de la société.
Le leader, élu par ses pairs, instaure naturellement un climat de confiance, favorisant la communication et réduisant tous risques de burn-out. L’abolition des privilèges est le premier pas vers la « libération », le second est d’autant plus difficile car il demande un effort d’adaptation supplémentaire. Les nouveaux leaders, élus démocratiquement, doivent amorcer la suite de la transformation de l’entreprise : l’abandon total des objectifs principaux et la répartition équitable des bénéfices. L’entreprise « libérée » n’est pas portée sur l’aspect visionnaire et ne se projette pas dans le futur, suivant plutôt une politique inspirée du poète Horace visant à « cueillir le jour présent sans se soucier du lendemain ». L’holacratie impressionne par son modèle d’exemplarité de la simplification des normes, par son approche avant-gardiste de codes de fonctionnements et surtout par son avantage compétitif prouvé sur tous les continents. Intéressons-nous désormais aux outils ayant contribués à l’essor de ce système de gouvernance 4.0.

3/ Les outils de l’entreprise 4.0

Le modèle holacratique ne peut exister sans les outils numériques du 21ème siècle, que sont par exemple les réseaux sociaux. Ces nouveaux modes de communications, d’abord usités pour une utilisation publique à caractère privé, familial, ont su s’adapter en fonction de la demande des milieux privés afin de fournir la meilleure expérience utilisateur possible auprès de l’ensemble des acteurs du monde du travail. La majeure partie des informations et données circulent dans l’entreprise à l’aide des réseaux sociaux, la communication entre différentes unités est donc simplifiée pour le bien-être de tous. Mails le modèle qui nous intéresse insiste sur l’utilisation de ces outils de la transformation digitale au profit de l’amélioration de l’humanité de l’entreprise et de ses membres. En effet la communication des sentiments, des craintes, des doutes, des joies des peines et même des idées permettent le renforcement ou l’apparition d’une solidarité entre collègues. Que ce soit sur Twitter, Google+, Facebook ou même Linkedin il faut absolument que la totalité des acteurs participent à cette amélioration car « seul, on va plus vite mais à plusieurs on va plus loin ». Les réseaux sociaux ne sont pas les seuls outils digitaux de cette entreprise nouvelle génération, il existe des logiciels et applications pour smartphones qui permettent à eux seuls l’organisation simplifiée de la communication interne et la gestion des présences.

Changer les us et coutumes n’est pas une mince affaire, en particulier dans le domaine des organisations. N’entendons-nous pas, souvent :  » Pourquoi changer notre manière de faire puisque cela fait des années que tout va bien ? ». Bouleverser la relation employeur/employé fait partie des enjeux RH de demain, dû tant au changement de la mouvance professionnelle que par l’ubérisation du marché du travail. Concernant l’environnement professionnel, l’heure est à l’holacratie avec l’aplanissement de la hiérarchie, favorisant l’intelligence collective et la motivation des employés. Cependant, comme tout modèle, l’application à la lettre des recettes, sans intelligence professionnelle, sans adaptation au secteur et à la culture d’entreprise et sans, enfin, changement de mentalité ne produira pas de résultats miraculeux. Alors, convaincu de sauter le pas ?

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Laurine Deschamps

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