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Le RTT : la pomme tentatrice des 35 heures

Les luttes de posture entre Martine Aubry et Emmanuel Macron ne doivent pas faire oublier que les 35 heures ont été accompagnées des 5 semaines de congés, qui elles ne sont pas remises en cause. Dans les sondages sur l’effet 35 heures, la scission entre cols blancs salariés et autres sondés opposés à l’immuabilité des 35 h, se fait autour des bénéficiaires ou non de droits à congés complémentaires (RTT et RCR). C’est bien les jours non travaillés surtout lorsqu’ils sont accolables qui cimentent les objectifs des employés (d’où les succès de la semaine compressée en Amérique du Nord -CWW).

En dehors de la majoration des coûts salariaux, l’effet pervers des récupérations additionnées aux congés et jours fériés, est indubitablement le réel mal des 35 heures encore plus sensible chez les cols blancs.
Accolées aux Week-ends et aux ponts, par souvent la seule volonté des salariés, à une époque où l’extension de la disponibilité des entreprises sur leur marché est un enjeu crucial, ces récupérations perturbent le fonctionnement de l’entreprise bien au-delà de la simple absence planifiable.

Dans l’échelle de la satisfaction apportée, les RTT ou RCR (pour repos compensateur de récupération) constituent la gratification supplémentaire la plus élevée et non taxée à laquelle un employé puisse accéder. Comment contrer l’effet des lois de Laborit qui dictent l’attitude au travail, attitude qui consiste à effectuer en priorité les tâches qui conduisent vers la plus grande satisfaction ? Pour conquérir le Graal des RTT, l’employé « hors forfait jour » va donc instinctivement reporter le travail indispensable en fin de cycle, afin d’assurer la contrainte de son dépassement horaire et constituer ainsi son ‘capital RTT’. Henri Laborit de la loi éponyme, a observé  cette attitude animale  qui consiste à privilégier des actions qui procurent une satisfaction immédiate, devenue chez l’humain dans le travail maximale par les effets de mémoire.

garesouriregral

 

Si le RTT constitue la récompense de l’employé au dépassement de son temps de présence, à quel effet positif pour l’entreprise ces récompenses sont associées ? à quelle dynamique vertueuse sont-elles rattachées ?
A première vue aucun effet positif compensateur des effets négatifs. Car si la fabrication d’un avoir RTT, porte une dérive des délais d’exécution sur les taches prioritaires, l’organisation de l’optimisation de l’avoir RTT, la fabrication du congé acquis sont des activités accaparantes au sein même de l’entreprise. La désorganisation de l’entreprise serait elle compensée par un bilan stress positif de ces minis périodes de repos ? Aucune étude ne démontre que le stress global (entreprise + vie personnelle)  ne diminue avec des petites périodes de repos non entrées dans les cycles habituels de vie.
Les entreprises sont coupables d’avoir par la liberté de choix accordée aux salariés accru l’effet aubaine des RTT dynamisés par les 35 heures. Et pourtant les lois TEPA  permettent d’encadrer la prise de ces RTT devenus RCR . Article L3121-24 : ‘’Une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche …  peut adapter les conditions et les modalités d’attribution et de prise du repos compensateur de remplacement à l’entreprise’’. Les accords portent sur les délais de récupérations des RCR acquis , 2 mois généralement limitent le cumul, sur la répartition de l’organisation de la prise 50% demandés par l’entreprise 50 % par les salariés…   

Le col blanc (employé ou cadre d’entreprise ) s’affirme comme le principal défenseur des 35 heures et c’est normal puisqu’il en tire jouissance extrême, mais il organise au nom de l’entreprise et pour les autres employés la déviance du système.
L’accès au capital RTT ou RCR en dehors des ‘forfaits jour’ est exclusivement conditionné à l’excès d’heures effectuées, tantôt qu’elles soient planifiées tantôt qu’elles soient exécutées au-delà de la planification. Mauvaise planification  ou bien exécution inflationniste d’horaires improductifs sont récompensées par des RTT pour la satisfaction de tous les bénéficiaires.
Le management ne va pas se tirer une balle dans le pied en faisant montre d’une compétence excessive pour produire des plannings optimisés et pour vérifier que les tâches exécutées en premier soient celles définies pour justifier le poste et non celles substitutives créées pour occuper les temps libres. C’est, le management ou l’encadrement, le premier bénéficiaire des RTT dont il va optimiser à son seul profit le placement, grâce un pouvoir d’achat qui les conduit à privilégier toujours cette issue plutôt que le paiement pour compenser les surcroîts horaires.
La refiscalisation des heures supplémentaires a parallèlement contribué à faire tester au plus grand nombre des non cadres, les voluptés des RTT : le profit tiré du paiement des heures supplémentaires diminuant, il rendait plus attractif la substitution en repos des heures supplémentaires. Repos qui pour certains est bien occupé à compléter des ressources par des travaux réalisés à l’extérieur comme 70% des Grecs.

Pour encadrer cette déviance, une des études sérieuses nécessaire, consiste à estimer dans chaque équipe , la répartition des sources des RTT, entre celles liées à :

  1. une planification grossière des présences, de mauvaises études des besoins qualifiés voire une mauvaise adéquation des besoins vs présences par compétence, qui seront rangés sous le chapeau ‘Déficit de planification’ (a) ainsi qu’une défaillance dans la couverture de l’absentéisme (b)
  2. une productivité individuelle dégradée par des Burn-Out ou Bore-Out passés voire un dépassement du seuil de compétence masqué par une réunionite aiguë (Principe de Peter)
  3. une complaisance inconsciente vers une dégradation de l’organisation (lois de Parkinson) et de la productivité individuelle pour remplir le temps d’abord par les tâches chronophages de complément d’occupation (lois de Laborit)
  4. un véritable surcroît de travail avec une productivité déjà optimisée (EPO)

Sans ce tableau, où les points 1 et 3 représentent généralement plus de 70 % des sources de RTT,  il sera difficile de minimiser les conséquences de l’attrait des récupérations. Tant que le RTT s’inscrira comme une force centrifuge de la vertu du travail mieux organisé et mieux exécuté, les forces de production de l’organisation et de remise en cause des déviances seront inopérantes. Agir vite est une nécessité pour éviter le syndrome APHP.

TEST LINKEDIN GRAAL

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Philippe Gosselin

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